Le canal alimentaire est un canal émotionnel

Gerda Boyesen, fondatrice de la psychologie biodynamique : « Au travers de ma recherche et de mon expérience clinique, c’est sans en avoir eu l’intention que j’ai mis en relation l’armure viscérale avec le canal alimentaire et que j’en suis venue à le considérer comme le conducteur (manager) des énergies instinctuelles et émotionnelles, et à le considérer comme le mécanisme de dissolution pour la régulation et la décharge des tensions nerveuses. Considérant que le canal alimentaire appartient aux couches embryologiques les plus primitives (endoderme), cela ne semblait pas trop farfelu que de considérer que les énergies et les impulsions primitives et instinctuelles sont transmises par ce canal. Ce canal est le principal conducteur et endroit de stockage des impulsions instinctives. Tout au long de ma pratique thérapeutique, je devins convaincue que le canal du « ça » était le canal intestinal. Je comparai mes hypothèses avec les théories de Freud et je saisis l’importance des fixations orales et anales qui se trouvent à chacune des extrémités du canal digestif » **

Si l’on retrace la forme structurelle des mammifères jusqu’aux animaux les plus primitifs, il y a une similitude frappante : la forme du canal alimentaire, lequel passe au long de la ligne médiane du corps, de la bouche à l’anus. Si nous pensons à un ver qui est uniquement développé comme un tube pour l’ingestion de nourriture, pour la digestion et l’élimination des déchets, alors le canal alimentaire apparaît comme le principal organe du processus interne de survie.

Dans ce canal alimentaire, qui est également le canal primitif de circulation de l’énergie instinctuelle, il y a quatre voies de décharge végétative. Elle peut prendre quatre expressions :

– les voies ascendantes de décharge : orale forte (cris, sanglots, pleurs, vomissements), orale douce (la parole, le bâillement, les rots, les soupirs profonds) ;

– les voies descendantes de décharge : anale forte (la diarrhée, les colites), anale douce (le psychopéristaltisme, les pets). ***

C’est exactement dans ce « canal du ça », avec les plexus nerveux, solaire, sacré et les organes émotionnels qui y sont reliés, que les conflits à l’intérieur du système autonome prennent place ou, d’un point de vue psychanalytique, le conflit entre le « ça » (en relation avec les pulsions) et le « Moi » (en relation avec les contrôles). Les intestins sont à la fois le siège de la partie la plus centrale de la personnalité, le lieu de digestion des émotions et des traumas, le canal d’une connaissance instantanée, et la source de l’énergie sexuelle, vitale et passionnée.

La découverte fondamentale de la psychologie biodynamique est la capacité du corps à digérer les émotions par ce canal – psychopéristaltisme – que je présente dans le paragraphe suivant. Gerda Boyesen, fondatrice de la psychologie biodynamique : « les patients qui avaient des réactions végétatives guérissaient très vite…la décharge végétative avait lieu, l’équilibre était retrouvé » et « si nous pouvons, par l’intermédiaire des muscles et des tendons, agir sur les viscères et les intestins, alors nous sommes capables de soigner aussi les névroses de la façon la plus directe » (Entre psyché et soma). Habituellement, les contractions intestinales sont reliées au processus digestif, mais on a montré que l’activité péristaltique a aussi une profonde influence sur les émotions et le système nerveux autonome. Pavlov a démontré comment un chien, dont le fonctionnement digestif est normal, contracte ses intestins lorsqu’un chat pénètre dans la pièce. Nous contractons aussi nos intestins lorsque nous sommes effrayés, lorsque nous sommes dans d’autres états émotionnels, et en hyperactivité. À l’opposé, lorsque nous nous relaxons, nous relaxons nos intestins et le travail digestif peut commencer (cette alternance répond au système sympathique et para-sympathique). Si nous sommes en bonne santé et sans conflit, nous déchargeons aussi le surplus d’énergie et de tension dans ce processus de relaxation. Très tôt après cette découverte du « psychopéristaltisme », Gerda Boyesen pris connaissance des recherches du Dr Stekleiev sur l’activité de la musculature lisse : deux types de stimuli provoquent des contractions intestinales, l’un étant les liquides digestifs, et l’autre la pression de l’eau dans les parois intestinales (pression de distension), fonction jusqu’à présent inconnue du monde médical. Cette pression de distension est à son sens reliée au fluide nerveux, et la contraction intestinale spontanée est reliée au processus concret de décharge du contenu nerveux. En d’autres mots, « cette fonction inconnue » du péristaltisme est le processus biodynamique de relaxation et de dissolution de l’armure viscérale par la détente et la décharge des manifestations conflictuelles dans le canal alimentaire. Connaissant le système antagoniste dans les viscères, elle put alors formuler l’hypothèse du processus de décharge et du traitement psychopéristaltique subséquent qui fut développé à partir de celle-ci. Lorsque le thérapeute biodynamique travaille sur ces points de pression fluidiques en massage, il travaille sur ce qui est le pus proche du Moi. La décharge végétative peut intervenir très intensément par le simple massage de ces points.

 

* La maladie coeliaque est un syndrome de malabsorption dû à une intolérance à une fraction du gluten : la gliadine. Elle se caractérise histologiquement par une atrophie totale de la muqueuse des villosités intestinales. Le régime sans gluten permet l’amélioration clinique et histologique.

**“La théorie biodynamique des névroses” Gerda et Mona-Lisa Boyesen.

*** “La psychologie biodynamique” François Lewin


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